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Un outil pour cartographier l'volution de la population d'une ville au fil de la journe


Comment savoir si un quartier est plus fréquenté en journée par les cadres supérieurs ou par les ouvriers ? Par les femmes ou par les hommes ? Quel est le mode de transport le plus utilisé pour se rendre dans le centre-ville en journée ? Quelles seraient les heures d’ouverture des services publics les plus adaptées aux populations présentes ? L’outil de géovisualisation Mobiliscope dont la nouvelle version a été mise en ligne ce 7 avril offre des éléments de réponses à ces questions en cartographiant heure par heure la population présente et ses caractéristiques démographiques et sociales.

10.000 communes et 65% de la population

Développé par une équipe du CNRS* et soutenu par l’Agence nationale de la cohésion des territoires, le Mobiliscope couvre dans sa nouvelle version 10.000 communes françaises – 49 agglomérations au total – dans lesquelles réside 65% de la population du pays. Proposé en français et en anglais, il englobe aussi depuis l'origine six territoires québécois. Il utilise et transforme des données concernant 2.528.000 déplacements réalisés par 792.000 personnes interrogées au cours de vastes enquêtes publiques.
En France, ces enquêtes sont commandées par les collectivités, tous les 10 ans environ, et réalisées selon une méthodologie standardisée du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), exception faite de l’Île-de-France, précisent les promoteurs de l'outil. Contrairement aux données de téléphonie mobile, elles fournissent non seulement des informations sociologiques (âge, sexe, catégorie socio-professionnelle) mais aussi les motifs de déplacement et les modes de transport utilisés, ajoutent-ils.

Mesurer la ségrégation à l'oeuvre au cours de la journée

En cartographiant heure par heure la population présente dans les quartiers et en mesurant la ségrégation dans les villes au cours de la journée, le Mobiliscope permet de montrer selon ses concepteurs que "la composition sociale d’un quartier ne se réduit pas au profil des personnes qui y passent la nuit". "Scientifiques et acteurs publics peuvent ainsi observer des phénomènes de gentrification ou paupérisation au quotidien, qui seraient invisibles s’ils s’en tenaient aux seuls lieux de résidences, mais aussi faire coïncider les temporalités de l’action publique avec celles des populations et des territoires", soulignent-ils.
De grandes tendances se dégagent pour toutes les agglomérations couvertes par l’outil : "la parité hommes-femmes dans les quartiers diminue fortement en journée, avec des zones qui deviennent majoritairement féminines et d’autres majoritairement masculines, en lien avec le volume, la localisation et les horaires des activités (professionnelles et domestiques) auxquelles les deux sexes sont inégalement assujettis", notent les concepteurs de l'outil. Quant à la ségrégation sociale observée au niveau résidentiel, elle se reproduit au cours de la journée en dépit (ou justement à cause) des déplacements quotidiens : les plus riches et les plus pauvres demeurent en journée les groupes sociaux pour lesquels l’entre-soi est le plus fort, au contraire des classes moyennes systématiquement plus dispersées sur le territoire que ce soit la nuit ou le jour, observent-ils.

Nouvelles fonctionnalités

Outre l'extension géographique offerte par cette nouvelle version, une importante refonte de l’interface et de nouvelles fonctionnalités répondent aux besoins des différents profils d’utilisateurs : spécialistes de politiques publiques et d’aménagement du territoire, scientifiques, monde de l’éducation, grand public. La nouvelle version permet par exemple d’identifier les habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Autre nouveauté : une couche OpenStreetMap permet désormais de se repérer plus facilement dans la carte interactive et de localiser les bâtiments publics ou autres équipements (universités, hôpitaux, zones d’activités, etc.) pouvant expliquer les rythmes quotidiens des territoires. Proposé depuis ses débuts sous licence libre, le Mobiliscope met également à disposition, sous le même régime, les jeux de données françaises agrégées par les géographes et géomaticiennes qui ont œuvré à sa conception.

* Au laboratoire Géographie-cités (CNRS/Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/EHESS/Université de Paris).

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